Akhbar le Gland

Publié le par Jullian

Bien sur, mon taxi est a la bourre. Mon bus est censé passer a 18h a Khur, on y arrive un quart d'heure plus tard. Mais il m'assure qu'il est pas encore passé, il sera la a 18h30. Hum. 18h45, un mec s'arrête et m'apprend que le bus est a 20h. Ah ça y est, ça commence !

Je suis pos
é en bord de route, un peu avant un rond-point, et j'ai rien a faire d'autre que d'attendre. De l'autre coté de la route se trouve quelques boui-bouis, mais rien de mon coté. Je suis seul et j'ai personne a qui parler. Je peux même pas bouquiner parce que je dois scruter l'arrivée du bus, d'un bus, n'importe quel bus, et le faire s'arrêter. Y'a rien de plus chiant que d'attendre comme ça, sans pouvoir s'occuper ni même laisser son esprit vagabonder.


J'arrête deux-trois bus mais ils vont pas sur Mashhad ou ils sont archi-complets. Mon incompétent de taxi me recroise une première fois un peu avant le coucher du soleil, vers 19h30. Il fait son étonné et dit qu'il va régler ça, Mouais, mouais, cause toujours. 20h30. J'en ai plein le cul. Les bus qui passent sont complets, ce qui est plutôt logique après tout. J'ai remis mes affaires sur le dos et ratisse large dans les environs pour trouver une solution, des infos, une place. Ça donne rien alors je me décide a retourner a Ateshooni, la pension de Garmeh. Je voulais partir ce soir pour une question de timing. Ça me permettait de voir Mashhad et retourner sur Teheran juste avant le week-end, pour prendre mon visa, et je pouvais prendre un vol pas cher pour Delhi dans la foulée. Maintenant que c'est mort, y'a plus rien qui presse et je suis content de retourner a Garmeh. J'avais comme un goût amer dans la bouche, un goût d'inachevé.

Je cherche un taxi quand mon mien me retombe une nouvelle fois dessus. Akhbar qu'il s'appelle. Décidément, les Akhbar que je rencontre ont tendance a être défaillants (et en plus, c'est des petits trapus qui contredisent leur nom - Akhbar = Grand). Il est tout excit
é et décidé a me trouver une place de bus lui-même. Je lui dis de laisser tomber, que j'ai déjà essayé, et que de toute façon je me suis mis en tête de revenir au bercail. Il écoute pas et me trimballe de bus en bus, qui s'arrêtent la pour faire une pause-dîner.

Il parvient tout de même a me trouver quelque chose. Je peux me foutre dans la soute d'un bus pourri, avec pour seul confort une couverture sous moi, pas de lumière, et un autre mec qui dormira a mes cot
és, a 10 cm de mon nez. Environ 9h de trajet comme ça. J'aime bien tenter de nouvelles expériences, mais je vois pas l'aspect positif de celle la. Et en plus, ces rigolos demandent a ce que je paie le même prix qu'une bonne place dans le bus. "Tu veux pas ? Non ? Mais pourquoi, c'est confortable, hein ?" Pffff. Rentre dans la voiture avant que je m'énerve et emmène moi a Garmeh.

Mais il veut pas s'avouer vaincu, il veut pas perdre la face, et je crois surtout qu'il appréhende la réaction de Mazyar s'il lui ramène un touriste qui était censé être parti depuis 3 heures. Alors on tourne en rond, encore et encore, il discute sans résultat, et moi, je lui gueule dessus pour me faire entendre, encore et encore.

Je suis oblig
é de montrer les crocs pour qu'il sorte de son obsession et fasse ce que je lui demande. Il s'y plie comme un enfant puni. Mais comme cet idiot n'est pas méchant et que je veux pas rouler avec sa tête d'enterrement a cote de moi, je lui demande de s'arrêter pour que j'achète des cigarettes (j'en ai bien besoin en ce moment, et les pétards fumés ces derniers jours m'ont redonné le goût de la clope), et lui en offre une, comme calumet de la paix. Ça suffit pour qu'il s'anime comme une fête foraine, rigolant comme un possédé, mettant de la musique dance a fond la caisse et dansant avec autant d'enthousiasme que de maladresse (il a bien 60-65 ans l'Akhbar). Le surlendemain, il passera chez Mazyar et me tombera dans les bras devant toute la famille (presque aussi estomaquée que moi, et éclatée de rire), m'embrassant même sur la bouche et me serrant très fort en rigolant. Définitivement dingue ce gars.

Publié dans IRAN

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article