Just a perfect day
Mardi 21 Juillet 2009
Just a perfect day... Départ en douceur en prenant le petit-déj au Reva en compagnie d'Anjay. J'aurai dû être en train de répéter avec Tetsu, mais lui et plusieurs autres japonais sont en ambiance festive depuis deux bonnes heures déjà. Dès huit heures, je les entendais rigoler comme des bossus dans la chambre voisine, celle de Kenji, le joueur de didjeridoo. Il a pas envie de lâcher tout le monde pour se mettre à la sitar. Pas le moment ni l'humeur. Je suis un peu déçu au début. Mais je décide de le prendre tranquillement. Je comprend tout à fait, donc pas besoin d'en faire un fromage. Ce sera le mantra de la journée : ne pas s'en faire et se laisser aller. Suivre son instinct, l'humeur du moment, et prendre son temps.
Je pratique un peu puis vais sur le net. Une heure et demi de skype avec la princesse Anne (pas celle de la famille royale, une mieux que ça), puis ma sœur et ma ch'tite Maïssanne adorée. J'ai plus d'énergie pour enchaîner avec la maman alors je vais manger. Je croise Anjay qui va présenter un coréen au seul dealer de shit digne de ce nom à Varanasi (à notre connaissance), le bon vieux Snoop (il lui ressemble un peu). Il a déjà mangé donc on se propose de se rejoindre plus tard chez Clélia. Au Reva, je tombe sur Sayaka, la reine de beauté qui fait baver tous les hommes des alentours. On était ensemble au New Kumiko il y a un peu plus de deux mois. Elle a fuit Bénarès pour Rishikesh pendant un petit moment, et vient juste de revenir aujourd'hui avec Hiro, un pote rencontré au Ladakh. Elle était partie pour fuir un malade prénommé Hank. Un turque barjo qui l'espionnait, lui écrivait des lettres de 6 pages en anglais (qu'elle parle mal), lui écrivait des chansons incroyablement bidons et mauvaises (il ne sait pas jouer de la guitare mais compose quand même – les deux titres : « Sayaka », et « I love you » - on peut pas faire beaucoup plus simple), lui demandait de l'épouser...Le fait qu'elle lui ait gentiment demandé d'aller voir ailleurs n'y aura rien fait. Sayaka est la femme de sa vie alors...
Bref, on se retrouve au Reva, et on discute et mange ensemble. On rigole bien. Elle est toujours la même nana hyper positive, pleine d'énergie, rigolote et curieuse des autres. Hiro, que je découvre, est tout aussi agréable, cultivé et francophile avec ça.
Retour à l'hôtel. Je squatte le toit avec Kenji, et un autre japonais. On reste comme des cons devant le spectacle du Gange, discutant paisiblement. Je demande à Kenji s'ils ont bien prévu de faire une jam session ce soir sur le toit, comme m'en a informé Sayaka. « Oooooh ! Sayaka is coming ?! - C'est ce qu'elle m'a dit en tous cas. - Ooooooh ! Tsugeee ! ». Ses yeux s'illuminent, et il arbore un gros sourire joyeux qu'il communique à son pote. Me voyant amusé, il m'avoue : « She's very beautiful... - Yes, very very beautiful », je confirme. Apparemment c'était juste une idée en l'air, mais maintenant que Sayaka vient, c'est devenu officiel, et c'est devenu sérieux. Je l'entendrai s'entrainer longtemps durant l'après-midi. Je crois bien que c'est aussi pour ça qu'il est descendu du toit. A peine sont-ils partis que je suis rejoins par une japonaise qui me passe un joint et me pose tout un tas de questions. Toutes les guest-houses des environs sont gavées de japonais et de coréens, à commencer par la mienne. Je dois paraître exotique pour le coup. En tous cas elle s'intéresse et on parle voyage, avant que je ne me décide à aller me poser dans ma chambre. Je pratique, je bouquine, et je plane complètement.
Je vais me promener dans Bengali Tola, et m'arrête au magasin de musique. Y'a trop de choix, trop de bonnes choses. Je commande des copies de plusieurs disques que je passerai prendre plus tard.
Je suis de retour dans ma chambre et le soleil commence à se coucher. Une belle lumière chaude tombe sur les toits de la ville. Le soleil va se cacher exactement derrière le minaret de la mosquée. Je trippe complètement sur cette image et sors l'appareil. On dirait l'éclipse avant l'heure. Le sommet arrondi du minaret forme un disque noir sur le soleil rougeoyant. Seul le croissant musulman se dresse juste au-dessus, disparaissant presque car noyé de lumière. Chez Kenji, la soirée musique a commencé bien plus tôt que prévu. La reine Sayaka est déjà là, alors les hommes donnent tout ce qu'ils ont sur leur instrument.
Je sors de nouveau. J'ai toujours pas rejoins Anjay chez Clélia. J'ai jamais que 4-5 heures de retard. Pour le moment j'ai faim, et je suis motivé pour aller au dhaba sur Godaulia. Mais sur la route, pas entièrement pour mon grand plaisir, je croise Jane, l'anglaise avec qui Greg et moi avons fait la route dans la Chamba Valley. Elle a pas perdu son débit de mitraillette qui ne s'enraye jamais. Elle parle elle parle elle parle. Elle ne s'arrête jamais de parler. Je crois qu'elle fait partie de ces gens qui ne supportent pas les moments de silences, les blancs dans les discussions. Du coup, pas moyen de respirer, et je me contente, pour le plus gros, de faire des hochements de tête, des mmmmm, et quelques autres signes du genre « je t'écoute, je comprend, c'est vrai ? »...Elle me parle d'un concert ce soir au Munna. Ça tombe bien, c'est chez Clélia. Ou plutôt, ça tombe pas bien, parce que se taper cette pipelette (très sympa autrement mais voilà....) toute la soirée risque d'être au-dessus de mes forces. On prend un chai dans la rue. Moi je fais comme d'hab, je dis trop rien, sirote mon nectar et observe le cirque fascinant de la ville. Elle, par contre, essaie sans cesse de lancer quantité de discussions, tout en se plaignant continuellement de la chaleur (je suis passé par là) et s'essuyant le front et tout le reste. Elle dégouline et ça la stresse. « Je dois puer ? C'est dégoutant », etc...Il me reste une porte de sortie. Le fait qu'elle veuille absolument se changer et prendre une douche à sa guest, et que moi je dois aller manger. Je lui indique du mieux que je peux comment aller au Munna pour le concert, et on se sépare en se disant qu'on s'y retrouvera. Je m'avale un Masala Dosa et file sur le net pour essayer de choper ma mère, comme je lui avais promis ce midi. Pas de connexion, pas de net, pas de maman. Kailash alias Manolito me tombe dessus et m'invite à prendre un chai. Chose faite. Tout va bien pour lui. On discute vite et superficiellement mais ça n'empêche pas de s'apprécier.
On se rend ensemble au Munna. Kailash est en manque de fête. En désintox de Bhagsu, où il traînait dans toutes les jam sessions et autres soirées organisées. Il arrivait toujours à se faire payer des coups, à tirer sur des pétards et même à récolter des bouts de charas assez régulièrement. Et puis il lui manque ce sentiment de liberté qu'il semble éprouver dans ce genre de fête. Il n'est alors plus indien. Il est un des nôtres, et c'est qu'il aimerait je crois. Il dit régulièrement que les indiens l'énervent. Des fois, il dit en rigolant qu'il n'est pas indien mais espagnol (qu'il parle couramment, d'où son surnom de Manolito, donné par un des nombreux touristes espagnols qu'il fréquente). Il vient d'une famille très pauvre, il a un métier qui gagne pas des masses non plus (vendeur de sticker – des autocollants de tous les dieux importants), et vivre parmi les touristes comme il le fait doit être une bouffée d'air pour lui. Et les deux mois et quelques à Bhagsu de véritables vacances, même si le manque de business là-bas l'a régulièrement miné, et qu'il n'a pas mangé tous les jours à sa faim.
Sur la route on tombe justement sur un groupe d'espagnols et de coréennes qui vont aussi au Munna. Manolito se lance dans une discussion en espagnol avec un des mecs. Je parle pas espagnol, mais je connais suffisamment Kailash pour comprendre ce qu'il raconte. Il me raconte les mêmes choses en anglais. Une espèce de vision de la vie, une philosophie du quotidien et de l'existence qu'il a grappillé un peu partout et mélangé à sa façon. Il le sort à toutes les sauces, constamment, en parsemant le tout de quelques phrases un peu slogan, qui résume sa pensée. C'est vraiment un sacré numéro, ce Kailash. Il connaît tout le monde, tout le monde le connait. On peut pas faire 100 mètres sans croiser un espagnol criant avec un sourire « Ola Manolito ! ».
On rentre dans le vieux bâtiment décrépit, et montons les escaliers craquelant dans la pénombre. De l'extérieur, et de l'intérieur aussi en fait, la fameuse Munna Guest House a l'air d'une baraque abandonnée. Personne ne s'en occupe, les proprios la laisse pourrir sur place, et ne s'occupe de rien. La plupart des chambres ressemblent à des squats, plus ou moins bien aménagées et nettoyées par les locataires eux-mêmes. Certaines chambres sont absolument vides et sales. « Vous avez une chambre de libre ? - Ben j'ai ça », dit Munna, en montrant une pièce vide, poussiéreuse, et un peu lugubre. « Vous pouvez prendre un matelas à l'étage en dessous... ». C'est pas le Taj, donc, mais c'est l'hôtel pour touristes le moins cher de la ville (50 Rs la chambre, 80 Rs avec SdB). Et surtout, c'est la seule guest qui n'a pas de couvre feu, et la seule qui ne donne aucune règle à suivre. Aucune règle sauf une : pas de djembe. Sinon, tout est permis. La guest est donc toujours quasiment pleine. Beaucoup de musiciens en tous genres, qui jouent du matin au soir, pratiquant seul dans leur chambre ou improvisant des petites sessions avec les voisins. Les pétards et autres tournent à plein régime. Il y a énormément de passage, des gens comme moi qui dorment ailleurs mais viennent se la couler douce, écouter de la musique, fumer des pétards ou les trois à la fois. Et pourquoi pas le faire sur l'énorme terrasse qui offre une des plus belle vue de Bénarès et du Gange ?
Je monte chez Clélia sans me préoccuper de Kailash, qui traîne derrière avec ses espagnols. Je le reverrai plus, je sais pas où il a disparu. Le concert dont les gens parlaient dans la rue est déjà fini. Anjay est déjà rentré (son couvre-feu est à 22h). Je m'installe dans la chambre de Clélia avec elle et Noni, un bel androgyne thaï (Clélia a mis plusieurs jours à réaliser que c'était un mec – le voir mal rasé un matin a levé tous ses doutes). On est rejoint bientôt par une inconnue de passage qui vient nous demander du feu et en profite pour se poser avec nous. C'est comme ça au Munna, une espèce d'esprit communautaire. Très apprécié quand on est le visiteur, mais pas toujours autant par ceux qui y restent. Trop de passage à partir d'un moment. Dans ce cas, y'a pas de problème, la nana est cool et l'ambiance aussi.
Bientôt on entend le son d'un accordéon qui vient du dernier étage, sur le toit. Ça change un peu, de l'accordéon, après des mois de musique indienne, de djembe et de guitare. Celui qui joue est doué, l'appel de la musique est trop fort. Dans un même élan, on se lève tous, et allons voir ça. Dans une chambre du toit, trois-quatre personne regarde et écoute un couple d'argentin. On pointe notre nez et nous faisons inviter à rentrer. A l'accordéon, une charmante brune au sourire large et communicatif. A sa droite, un grand échalas brun avec des cheveux courts et une seule dread lock qui lui descend plus bas que les fesses. Il tient une Kanjeera dans la main (je connaissais alors pas cet instrument du sud – une petite percussion circulaire toute simple, un anneau de bois avec une peau dessus, et trois ou quatre minuscule cymbales attachées dessus).
Tout deux assis en tailleur, ils échangent un regard. Elle lui dit quelque chose en espagnol. Il hoche la tête pour seule réponse. Genre, vas-y, je te suivrai. Les doigts de la nana cherche la bonne gamme sur les touches de l'accordéon. Elle trouve son bonheur, regarde une dernière fois le mec, puis lance un large sourire de traqueuse à la nana qui nous accueille dans sa chambre et a prêté l'instrument. Cette dernière lui sourit à son tour et lui donne les encouragements demandés. Elle se lance alors et je vois ses doigts danser sur l'accordéon. Le mec est pas long à prendre le rythme, et attaque direct comme un dément. Avec son petit machin, il nous sort des sons hallucinants, qu'il enchaine à un rythme endiablé. C'est pas un guignol ou un percussionniste du dimanche, ça se sent tout de suite. Et là, boum ! dans ta face, la nana se met à chanter en espagnol. Une voix incroyable, habitée. Je suis complètement sur le cul de me retrouver là, et au début je regarde les autres pour voir s'ils entendent bien la même chose que moi. Quelques échanges de regards stupéfaits par la grâce, puis bientôt on n'a plus d'yeux que pour eux. J'ai fumé juste la bonne quantité de pétard juste avant, c'est-à-dire, dans mon cas, très peu. Pas au point de partir dans les nuages et de perdre ma concentration, mais juste assez pour me laisser totalement emporté par la musique. Je suis réellement foudroyé par la voix de cette nana, et me demande ce qui la rend si belle et touchante. Une voix entre ciel et terre. Qui prend racine dans notre monde, ses joies et ses misères, ses tristesses et ses beautés, et qui s'envole dans les cieux, appelle le divin et touche la grâce. J'entends tout ça dans sa voix. A la fois la mélancolie des hommes et une ode à la gloire, à la beauté du monde et du ciel. Et pour couronner le tout, elle chante en souriant. C'est d'une beauté ! Nom de dieu !
Pendant ce temps là, elle triture son instrument comme le diable en personne, et le mec fait faire tout et n'importe quoi à sa percu, changeant sans cesse de rythme et de jeu, sans jamais perdre le fil. Ils enchaînent plusieurs chansons comme ça, passant de chansons espagnoles ou sud-américaines, à du classique indien ou des folk song du Rajasthan. Et tout est incroyable, et tout est magnifique, et tout ce répertoire disparate est d'une homogénéité étonnante. A un moment arrive une coupure d'électricité (c'est dix fois par jour en ce moment) et la nuit nous tombe dessus. On se retrouve dans le noir complet, alors qu'ils viennent de commencer une chanson. Ils poursuivent de plus belle, et la voix de l'accordéoniste atteint des sommets. Elle semble libérée d'un poids, celui de nos regards, et elle nous emporte très loin. Je plane très haut, drogué par la musique. J'ai quasiment les larmes aux yeux. Jusqu'à ce qu'un insensible se soit mis en tête d'allumer une bougie qui elle, ayant bien compris le problème, refuse catégoriquement de s'allumer. La bougie mélomane résiste pendant bien dix minutes, mais ne pourra pas savourer sa victoire bien longtemps, car le mauvais perdant a trouver une parade plus odieuse encore, en laissant trainer sur le sol une lampe torche à la lumière blafarde. Je ferme les yeux et décide d'oublier tout ça. Peu de temps après, le courant revient.
Une ou deux chambres plus loin, on joue de la sitar et des tablas. Eux aussi sont bientôt attirés par ce qui se passe ici. Fabian, un mélomano-musicophile-musicophage (il trimballe avec lui un laptop entièrement rempli de musique – 200 gigas de sons rangés par continent et par pays – ils y sont tous ou presque, il suffit de demander) colombien que j'ai rencontré dans la Chamba Valley, amène ses tablas avec lui, et se joint à eux. La première chanson, il a du mal à rentrer dans le truc. Faut dire que le niveau est corsé, et qu'il n'a que quelques mois de tabla derrière lui. Ensuite il simplifie son jeu, revoie ses ambitions à la baisse, et ça passe beaucoup mieux. Ils se mettent alors à jouer des chansons sud-américaines, et comme par magie, porté par la même énergie et le même feeling, les deux mecs se mettent à faire les chœurs après la nana. On est tous énergisé, un sourire idiot sur le visage, et les hanches qui commencent à se déhancher. Vous voulez une ambiance festive, invitez des sud-américains. Quelle patate ! Quelle joie communicative !
Désirant une pause sans doute, l'accordéoniste rend l'instrument à sa propriétaire en lui suppliant de lui jouer un air français (apparemment elle serait française – c'est curieux, je l'ai croisée des tas de fois, et on s'est toujours, brièvement, parlé en anglais – qu'elle parle avec un pur accent anglais). Toujours est-il qu'elle se lance dans un air d'accordéon à la française. Je reconnais trop la France dans cette musique, dans la façon de jouer. J'ai l'impression d'entendre en musique l'incarnation de l'esprit français. Je me dit à moi-même comme dans une révélation : « Ah ! Mais c'est ça la France en fait. C'est ça l'esprit français. Ou ça l'était, peut-être. » Le contraste avec les airs espagnols, argentins ou indien est saisissant. Je trouve ça vraiment beau. Et je me surprend à penser du bien de mon pays. J'en serai presque mélancolique d'entendre ça. Comme un léger mal du pays tout d'un coup. Elle finit son morceau. J'en suis encore tout ému et elle annonce qu'en fait c'était un air colombien. Je sais plus trop quoi penser pour le coup. Qu'on m'y reprenne, tiens, à avoir des sentiments patriotiques.
L'heure de mon couvre-feu approche dangereusement, puis est finalement dépassée, mais je peux pas partir. Pas moyen. Ça discute un peu, mais je sens que c'est pas fini. Ils en ont encore sous le pied. Le percussionniste négocie avec Fabian pour lui emprunter ses tablas. La chanteuse reprend l'accordéon pour l'accompagner. C'est reparti ! L'accordéon virevolte en solo pendant quelques secondes, le temps pour le mec de capter le rythme. Et il se lance. Grosse claque. C'est pas un type qui apprend à jouer des tablas, c'est un type qui maîtrise carrément, et qui nous fait des trucs pas possibles, avec un goût et un groove impeccable. Pour le coup, j'en oublie un peu la nana, sa belle voix et son joli sourire, et me laisse hypnotiser par le son des tablas et les doigts de l'argentin qui s'excitent à toute vitesse sur les peaux.
Je suis heureux. Je me dit que je viens de vivre une journée superbe. Je me dis que ses deux phénomènes argentins viennent de me rendre Bénarès. Ça faisait quelques jours que j'étais revenu, mais j'avais pas encore retrouvé le bon état d'esprit. Cette ville demande qu'on se laisse aller, qu'on se laisse emporter par les multiples énergies qui la composent. Et alors, et alors seulement, on voit Kashi sous son vrai jour. Alors on sait que dans cette ville tout est possible, tout peut arriver. On ne sait jamais où on sera dans une heure, occupé à quoi ou spectateur de quel incroyable scène. Elle ne s'offre pas à tout le monde et beaucoup de gens passent ici sans la comprendre, et sans l'aimer. Je fais à nouveau partie de la ville. Je suis de retour chez moi, et je suis heureux.
Je profite d'un break qui me semble possiblement définitif pour m'extirper de la pièce. Je peux tout de même pas m'empêcher, courtoisie et gratitude infinie oblige, à les saluer bien bas en les couvrant de compliments et de remerciements chaleureux. Ils me répondent qu'ils me connaissent, qu'on est dans la même guest-house. Ils connaissent mon nom par un mec qui leur a parlé de moi, qui se dit mon ami, mais ils en ignorent le nom et je suis bien incapable de deviner qui sais. Un ami mystère. Ça fait très étrange. Clélia se fout gentiment de moi en me disant que je suis une célébrité sans le savoir. Ils disent qu'ils avaient voulu me voir jouer avec Tetsu l'autre jour, mais qu'il y avait déjà trop de monde dans ma chambre alors ils ont écouté un peu de l'extérieur. Ils me font des compliments (ce qui est complètement faux-cul, parce qu'en vérité, ce soir là j'avais vraiment joué comme une merde et j'en ai même eu honte, mais j'apprécie quand même et me sens con de l'entendre dans la bouche de ceux que j'ai admiré pendant près de deux heures).
Je rentre un peu groggy par toutes ses émotions, et dans les vapes agréablement cotonneuses d'une défonce qui vient d'atteindre son apogée.
Just a perfect day.