Dans la vallée de Qadisha

Publié le par Jullian

Je me réveille vers 8h et profite du fait qu'ils dorment encore. Je finis par sortir du lit Marco, qui doit m'accompagner faire un trek. Malheureusement, Antoine se lève aussi et se décide au dernier moment a nous accompagner. Antoinette lui offre le petit-dej. ("oh merci madame, ça c'est vraiment sympa") comme a nous et on se bouge. On descend dans la vallée par un sentier de berger assez abrupte. Les paysages sont magnifiques, et tant qu'on marche, Antoine ne m'agace pas. Je finis par me faire a sa présence, et tout se passe agréablement bien.


On visite des monastères, des ermitages. La vallée en est pleine. C'est le coeur et le lieu de fondation de l'ordre, de la foi Maronite.


A un moment, on croise des ouvriers qui font une pause a l'ombre. Ils nous retombent dessus en camion et nous invite a grimper. Ce sont des syriens, ce qui veut dire des gens extrêmement sympathiques. Ils viennent travailler au Liban parce que le salaire est bien meilleur. On discute sur le trajet, a bord de la remorque. La conduite dans les montagnes, sur un chemin de terre en bord de précipice, est complexe. On avance lentement, pour éviter de partir au tas, et pour préserver les dalles qu'ils transportent. Encore une fois, un film me vient a l'esprit. Je me vois dans "Le salaire de la peur" ou son remake "The sorcerer" (a ne pas manquer, amis cinéphiles!), la nitroglycérine en moins. Des dalles finissent par se briser. Ce qui rend fou le chauffeur libanais, chef du convoi. Il arrête tout et gueule dans son téléphone, apparemment pas content des conditions de transport.


On poursuit a pied, et on s'arrête a un resto-terrasse installé sur pilotis, au bord du chemin, au milieu de nulle-part. On est les seuls clients. Marco et moi achetons un sandwich qu'on complète avec ses propres victuailles. Antoine sort ses oeufs, son pain raci et sa moutarde. La table de resto se transforme en table de pique-nique. On prend notre dessert dans les arbres alentours et on continue rassasiés.
Pendant qu'Antoine est occupé a se chier dessus dans les bois, Marco et moi visitons un monastère. On peut même y voir une momie naturelle d'un des patriarches. Brrrrrr. C'est quand même un peu bizarre, mais fascinant. Antoine finit par nous rejoindre une demi-heure plus tard, avec son caleçon qu'il a lavé dans la rivière séchant sur sa tête, coincé sous sa casquette. On dirait un saoudien avec ce caleçon rouge et blanc qui lui tombe sur la nuque. Les syriens nous retombent dessus au monastère, enfin sortis de leur galère. Ils nous proposent de manger avec eux. Comme on vient juste de le faire, on décline leur offre, mais ils sont quand même incroyables, ces syriens !


Je propose alors qu'on entame la remontée vers le haut de la vallée et la route bitumée, pour y faire du stop pour le retour. J'attaque un petit sentier qui grimpe dur, dans des virages incessants. Ils sont fatigués, mes deux hippies, alors Marco traîne derrière, avec l'air d'un sprinter en pleine montée de l'Alpe-d'Huez, a son rythme et dans la douleur. Antoine essaie de suivre tout en râlant. Il a déjà fait l'expérience de se paumer dans la nature et d'être coincé par la nuit, alors il me prévient que j'ai pas intérêt a m'être planté de route. Vu comment la montée est dure, j'aimerai autant pas, moi non plus, que ça mène a un cul-de-sac. Pour le faire chier, je durcis le rythme petit a petit pour le faire craquer, et m'arrête de temps en temps pour admirer la vue, et permettre a Marco de recoller.


Je suis tout heureux d'avoir du souffle et de l'énergie. Je grimpe comme un cabri alors que d'habitude je suis fatigué après un tour en ville. Les heures de marche ont du me décrasser les poumons, ça fait une sacrée différence. On remarque des chiffres sur les rochers et on en déduit qu'ils marquent le nombre de virages restants. On est pas loin du sommet, mais il reste encore 88 virages ! On fait une pause. Je fais de l'escalade pour atteindre une immense grotte a flanc de falaise, mais a mon grand regret, pas la moindre trace de dessins préhistoriques, ni de cache d'armes, comme j'osais espérer. On voit enfin des grandes maisons sur pilotis, et émergeons sur le sommet, petit village qui s'étale au bord de la route. On est trempés de sueur et assez content de nous, surtout quand on voit ce qu'on a monté.


La première voiture qui passe nous prend. Un 4x4 climatisé conduit par un fervent catholique qui parle français avec une voix trainante de robot. "On ai-me beau-coup la Fran-ce. Fran-ce, la me-re du Li-ban". Ok, Ok. Il a le regard fixe et vide, et parle avec une voix plate, sans expression, inhumaine. Un peu flippant, le type.
A la Tiger House, Tony et des ouvriers sont occupés a construire un jardin d'hiver sur la terrasse. Antoine squatte la télé, Marco scotche, moi j'écris. On est repartis pour une nouvelle soirée pleine de chaleur, de rires et d'échanges...C'est la guerre froide entre Antoine et Antoinette, même s'il fait comme si de rien. Marco et moi dînons a la pension. Copieux et succulent. Antoine sort ses oeufs et du pain raci. Je lui donne du pain frais et 2-3 bouts de viande (donnés par Marco le végétarien, donc ça me coûte rien). C'est tout ce qu'il aura et je le préviens que je le mords s'il touche a mon assiette. Faut assumer un peu maintenant.
Soirée nase.
Dodo.

Publié dans LIBAN

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