L'ivresse du voyage

Publié le par Jullian

Le lendemain avance au même rythme.


Même si en ligne de mire, il y a mon départ, prévu pour 16h (du coup, prévoyant, j'ai demand
é un taxi pour 15h, ce qui sera un bon calcul). Beaucoup d'écriture dans ma sublime chambre a l'ambiance tamisée et vue sur la palmeraie. Je lis Hafez toujours, qui, comme Omar Khayyam, n'a d'intérêt que pour l'Amour, l'Ivresse et les bons plaisirs. Philosophie a laquelle j'adhère complètement.
Grand évènement de la journée : j'ai fait rire Mazyar, en me moquant gentiment de sa femme. C'est la première fois que je le vois sourire, c'est pour dire. Après une séance de découpage de viande (de quoi nourrir un mois, je pense) en cuisine, mon taxi arrive, je fais mes adieux et pars pour Khur.


Le taxi me laisse en bord de route, au milieu de nulle-part mais près d'un arrêt de bus. Donc j'ai de l'ombre, et même de l'eau, grâce a un robinet a coté. De quoi patienter au frais, parce que ça tape dur. Y'a très peu de passage, et les quelques rares véhicules ne s'arrêtent pas. Au bout de 30 mn, un motard s'arrête, se demandant ce que je fous la. Je lui explique que je fais du stop pour Tabas (plus grande ville du coin, a 200 bornes de la, ou j'espère trouver un bus pour Mashhad). Juste a ce moment la, un vieux camion arrive. Il me demande si ça me va, un camion. Je lui dis que oui alors il gueule comme un putois après l'engin qui vient de nous passer, gesticulant furieusement (ah...c'est comme ça qu'on fait du stop ici...-parce que faut éviter le pouce, ça veut dire "je t'encule" - j'en ai insulté, des gens, avant de le savoir). 200 mètres plus loin, le camion s'arrête enfin, péniblement. Le motard m'y emmène, le chauffeur va bien sur Tabas alors je monte et m'installe confortablement.


Le camion est une vraie antiquité. Il doit bien avoir 30 ou plutôt 40 ans. Ça lui donne du charme, mais par contre il avance pas un cul. Le compteur arrive pas a dépasser les 60-70 km/h, un peu plus en descente, beaucoup moins dans les montées. J'ai bien fait de partir tôt.


Mais c'est parfait pour admirer le paysage, fantastique tout le long du trajet. Le routier parle pas anglais, je parle pas perse, donc on parle pas et on a l'air tous deux satisfaits comme ça.


On met trois heures a atteindre Tabas, déjà plong
ée dans la nuit. Des kilomètres avant d'y être on aperçoit déjà l'Imamzadeh Hossein Nebn Musa, un immense complexe religieux qu'on dirait flambant neuf, et qui brille de mille feux. Ça détonne dans ce paysage désertique. Le chauffeur me dépose la, non loin de la gare routière, et refuse d'entendre parler d'argent.

Me retrouvant la, devant cet immense bâtiment illumin
é qui crache des prières a pleins poumons, au milieu du désert, l'air sentant mille odeurs et la foule environnante bruissant de mille mots que je ne comprend pas, j'ai une ennivrante sensation de voyage, une sensation d'ailleurs que je n'avais curieusement pas ressenti jusqu'ici. Pas de cette manière en tous cas.

Je marche le coeur léger vers la gare routière. D'abord on me dit que c'est complet, qu'il n'y a plus la moindre place. Ça me désespère tout ça et j'insiste un peu. Alors on me propose une des places du pauvre, a l'arrière d'un vieux bus. En l'essayant, je comprend pourquoi c'est la place du pauvre : le siège est confortable bien qu'étroit, et surtout très peu profond, mais c'est le dossier le problème. Une sorte de planche de bois inclinée dans le sens contraire de celui qui voudrait s'allonger, inclinée vers l'avant quoi. C'est pas incroyablement confortable mais ça va le faire et ça coûte rien (Tabas - Mashhad = 521 km = 8h de trajet ~1,60 Euros). Donc j'aurai fait plus de 700 km aujourd'hui , et pour moins de 2 E. je me demande vraiment pourquoi j'ai pas fait plus de stop en Iran.


La nuit est un peu dure mais après quelques heures, je me retrouve seul sur la banquette arrière. Je peux m'allonger sur le cot
é (c'est pas assez large pour se mettre sur le dos) et somnoler confortablement tout en m'accrochant pour ne pas tomber. Un vrai p'tit koala.

Publié dans IRAN

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