L'enfant sauvage

Publié le par Jullian

On se retrouve tous au petit-déjeuner. Gueules enfarinées regroupées en cercle. Très vite, les pétards reprennent leur ronde habituelle. J'ai pas envie d'être décalqué des le réveil alors je passe mon tour. Comme souvent dans ces groupes enfumés, la parole est superflue ou hors-de-portée. Les discussions sont sommaires, brèves. Ambiance relax et silencieuse.


Seule Yuan a toujours rien compris et s'entête a blablater a tort et a travers, possédant un réservoir de questions agaçantes impressionnant. Sa voix me fait le même effet que le vol d'un moustique autour de mes oreilles quand je cherche le sommeil. J'ai pas l'insecticide appropri
é alors je me décide a tirer sur les pétards, pour m'aider a l'ignorer et penser a autre chose. Les instruments de musique sont rapidement de sortie et on enchaîne des morceaux improvisés qui nous emportent et nous font encore plus planer. La voix de Yuan n'est plus qu'un murmure cotonneux sans importance.


Plus tard, une partie du groupe s'en va voir une source au pied de la colline. Je suis le groupe. Yuan traîne derrière, s'accrochant a un type extraordinairement cool et patient, qui répond sans perdre ses nerfs a toutes ses questions. Le pauvre en prend pour des heures. Je suis admiratif. La source se trouve dans une grotte. Des centaines de petits poissons nagent dans une petite mare, un trou d'eau. L'eau est fraîche, c'est le paradis. On fait tous trempette.

La Sinead enfantine se met en bikini et s'y baigne. Chose tellement banale par chez nous, tellement étonnante et subversive par ici. Même si rien dans son comportement ne laisse penser qu'elle cherche a être subversive, rebelle. Elle me fait penser a une enfant sauvage, libre de ses actes, agissant selon son instinct, son bon vouloir, totalement innocente. Elle découvre bientôt que la terre dans la grotte est une espèce de glaise, et qu'elle peut s'en servir comme peinture. Elle se pose alors et commence a dessiner délicatement des arabesques ocres sur ses pieds et ses jambes. Elle remplit son chapeau de paille de terre sèche, pour ramener a Teheran.

Une bonne demi-heure de tranquillité et de fraîcheur. Puis Yuan arrive en compagnie de son maître zen. Il est temps de bouger. Retour au bercail.

Publié dans IRAN

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